Augmentation de la taxe foncière : La mairie n’est pas toujours coupable !
Dernière mise à jour : 25 oct. 2024
Ah, la taxe foncière... Sujet sensible s'il en est, qui a le don de rendre les propriétaires perplexes chaque automne. Et cette année encore, beaucoup se demandent pourquoi elle a augmenté… La réponse est souvent trop simpliste et consiste à pointer du doigt uniquement la commune, son Maire et forcément sa mauvaise gestion. Et pourtant, il serait injuste de résumer la hausse de la taxe foncière à une simple décision locale. Il existe des raisons bien plus complexes qui justifient cette hausse. Explications.
Par Gildas Lecoq

Tout d’abord, il faut comprendre que la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) est un impôt local qui concerne aussi bien les propriétaires d’un bien immobilier que ses usufruitiers. Soyons clairs : oui, les communes peuvent ajuster leur taux de taxe foncière, c’est d’ailleurs le dernier impôt local sur lequel elles ont encore « la main ». Certaines, confrontées à des contraintes budgétaires, à des investissements lourds (et sans aucun doute nécessaires), choisissent de le faire notamment depuis la suppression de la taxe d'habitation qui, elle, concernait essentiellement les locataires d'une commune. Toutefois, dans bien des cas, même si la commune ne touche pas à ce fameux taux, l’impôt peut tout de même grimper.
Le grand méchant "État" et la revalorisation nationale des bases
Pourquoi ? À cause notamment de la revalorisation annuelle des bases imposables, qui correspondent, dans le cas de votre taxe foncière, à la valeur cadastrale des biens immobiliers.
Chaque année, l'État revalorise ces valeurs pour éviter que l'inflation n'érode le montant des impôts collectés. Cette revalorisation est d’ailleurs effectuée par l'État, sur la base d'un coefficient fixé dans les lois de finances annuelles, elles-mêmes votées par vos parlementaires. Vous le voyez, on est déjà un peu plus loin de l’unique décision votée par le maire et son équipe municipale !
Je ne vais pas vous mentir en reconnaissant que ce mécanisme permet aux collectivités locales de percevoir des recettes fiscales qui restent en phase avec l'évolution des prix et des coûts, tout en évitant d'augmenter les taux d'imposition de manière trop brutale. Politiquement, voter 0% d'augmentation d'impôts et bénéficier de plus de recettes c'est toujours un très bon combo !
Cette année, par exemple, la revalorisation de ces bases a été de 3,9 % ! Et donc, même avec un taux municipal constant (0% de variation du taux donc), le montant final de votre impôt foncier a pu malheureusement gonfler. En clair, si votre commune n'a pas voté de hausse, vous avez pu quand même avoir une mauvaise surprise dans votre boîte aux lettres fin août. Eh oui, quand ça gonfle au niveau national, ça se répercute aussi sur votre feuille d’impôt, et le maire n’y peut pas grand-chose. C’est important de le rappeler car votre maire, étant le plus proche de vous, est souvent celui qu’on critique, comme le disait Georges Pompidou, "à portée de baffe" !
Le grand chamboulement de 2028 : préparez-vous
Actuellement, les valeurs locatives cadastrales, sur lesquelles repose la taxe foncière, datent des années 70. Autant vous dire qu’elles sont complètement déconnectées des réalités du marché immobilier actuel et de l’évolution de certains territoires.
Inscrit dans la loi depuis 2010, on pouvait se demander si le principe de la révision des valeurs locatives ne resterait pas bloqué, comme tant d’autres avant lui, dans les circuits internes de l’administration. Malheureusement non. Tout s’est accéléré en 2015, sans véritable débat, les collectivités ont dû se prononcer en un mois sur un « projet de revalorisation », ne permettant donc pas de corriger les imprécisions des secteurs tarifaires et des découpages géographiques dans leur commune. Deux plus tard, en 2017, le référentiel des locaux professionnels était révisé. Reste désormais à réaliser la revalorisation des locaux d’habitations. Ce qu’il faut savoir, c’est que depuis 2015, une expérimentation de la révision des valeurs locatives est menée dans cinq départements (Charente-Maritime, Nord, Orne, Paris, Val-de-Marne). Cette révision a permis de confirmer que sa généralisation était techniquement réalisable et opportune.
C’est pourquoi, à partir de 2028, une nouvelle révision de ces valeurs devrait entrer en vigueur, basée sur les loyers constatés en 2025. Pour faire simple, les logements dont la valeur locative est actuellement sous-estimée pourraient voir la taxe foncière de leur propriété exploser. Ce n’est pas une mauvaise nouvelle pour tout le monde : certains biens, aujourd’hui surévalués, verront leur taxe baisser. Mais attention, on s'attend globalement à une hausse pour de nombreux propriétaires, surtout dans les zones où l’immobilier s’est envolé depuis ces dernières décennies.
Réformer pour plus d’équité ?
Tout cela participe d’une réflexion plus large sur la réforme de la taxe foncière, car soyons honnêtes : elle a grand besoin d’une mise à jour. En révisant les valeurs locatives, l’objectif est d’aligner la taxation sur la réalité économique des biens et des bassins de vie. Oui, il faut moderniser le système, car l’injustice actuelle est criante : des propriétaires de biens situés dans des zones en plein essor payent moins d’impôts que d’autres, dont les logements sont dans des zones en déclin. Il est donc temps de rendre cela plus équitable pour tout le monde.
Alors oui, personne n'aime voir sa taxe foncière augmenter. Mais gardez à l'esprit que cette hausse n'est pas toujours liée aux choix de votre commune. Parfois, même le maire aurait bien aimé vous épargner ce choc... Mais c'est la dure réalité d'un système complexe en pleine mutation. Avec la fin de la taxe d’habitation, le maintien de cette taxe foncière pose d’ailleurs énormément de questions sur le financement de nos territoires. En effet, qu’elle est désormais la réalité de l'autonomie fiscale de nos communes et cette situation est-elle encore compatible avec le principe de libre administration des collectivités territoriales ? Le sujet est passionnant ! Pourquoi seuls les propriétaires seraient localement imposés ?
Quoi qu’il en soit et malgré la période compliquée que nous traversons, d'ici 2028, la réforme qui se prépare pourrait bien changer la donne. En attendant, restons zen, prenons un café (ou deux), et n’oublions pas que la politique fiscale est un chantier en constante évolution. Si la pilule est parfois difficile à avaler pour certains propriétaires et certaines communes, sachez que des réformes sont en route pour tenter de rendre la situation plus juste. Allez, courage, on y croit !
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